Horizon roussettes

Environnement

4 espèces de roussettes en province Nord

La province Nord est la seule province de la Nouvelle-Calédonie à abriter les 4 espèces de roussettes présentes dans notre pays. En effet, on peut y trouver des roussettes rousses (Pteropus ornatus), qui sont endémiques et des roussettes noires (Pteropus tonganus) qui sont autochtones mais également présentes dans d'autres îles du Pacifique.

Ces espèces sont les deux espèces les plus communes et également les espèces qui sont chassées. Mais ont peut également y trouver les roussettes des cailloux (Pteropus vetulus), endémiques à la Nouvelle-Calédonie et des roussettes à queue (Notopteris neocaledonica), endémiques à la Nouvelle-Calédonie et uniquement présentes en province Nord.

Infographie page 3 du Livret écologie des roussettes en PN

Les roussettes sont en déclin, il faut réussir à les préserver pour les générations futures

Les roussettes sont des animaux emblématiques pour l’ensemble des Calédoniens et elles occupent une place importante dans la société et la culture Kanak. De plus, fidèles jardinières de nos forêts, elles participent au maintien et à la restauration de nos écosystèmes en dispersant les graines et pollinisant les fleurs. 

Cependant, ces espèces sont chassées chaque année en grand nombre et par l’ensemble des communautés du pays. La gestion de ces espèces est très complexe et la stratégie et les moyens actuellement mis en place ne permettent pas leur préservation pour les générations futures. On constate également qu’il est compliqué de faire appliquer la réglementation sur l’ensemble du territoire.

A l'heure actuelle, on pourrait perdre cette partie importante de notre patrimoine naturel et culture que sont les roussettes si on ne fait rien pour mieux les préserver. En effet, avec l'augmentation des prélèvements liés à la chasse, légale et illégale, ainsi que l’augmentation de certaines de leurs menaces comme la prédation par les chats ensauvagés ou encore la réduction des forêts, on se pose la question de la survie de ces espèces dans le contexte actuel.

Co-construire la gestion des roussettes de demain avec l’ensemble des habitants de la province Nord

La province Nord porte actuellement un projet de gestion concertée des roussettes, première phase du programme Horizon roussettes, cofinancé par l’Office français de la biodiversité. Ce projet a pour objectif de favoriser l’évolution de la gestion* vers une meilleure préservation de la population de roussettes en prenant en compte les aspects socio-culturels ET en associant les habitants aux réflexions.

*La gestion: ensemble des méthodes, des moyens et des actions mis en œuvre pour gérer ces espèces.

Photos de roussettes dans un arbre
Photo monnaie

Processus de concertation

Dans le cadre du projet Horizon roussettes la voie de la concertation a donc été choisie afin de laisser la place au plus grand nombre de s’exprimer sur son lien avec ces espèces, ses pratiques de chasse, d'usage et de consommation et son avis sur comment devrait être la gestion de demain. Le processus de concertation a permis de réunir un groupe de concertation composé de 23 habitants et habitantes de la province Nord se sentant concernés par les roussettes.

Ce groupe de concertation avait pour mission de co-construire des propositions pertinentes d’évolution du système de gestion des roussettes en province Nord. C'est-à-dire d’élaborer, avec le soutien de la province et de ses partenaires, des propositions de gestion future de ces espèces chassées par l’ensemble des communautés du pays. Ces propositions seront présentées et débattues lors du forum sur les roussettes ouvert à l’ensemble des habitants de la province Nord qui aura lieu le 8 octobre 2022 au Centre Culturel Goa Ma Bwarhat à Hyehen (Hienghène).

A l’issue du forum, les échanges et débats sur les propositions qui auront été faites seront compilés et analysés afin d’élaborer un cahier de recommandations qui sera par présenté aux élu.e.s de la province Nord.

Les chiffres

Historique

Pour pouvoir gérer préserver les espèces les plus menacées, la province Nord a financé de nombreux programmes de recherche, c'est notamment le cas pour les roussettes où elle investie depuis plus de 15 ans pour mieux les connaître et identifier des solutions pour les préserver.

Le Livret écologie des roussettes en PN synthétise l'ensemble de ces résultats.

Une étude est actuellement menée par l'Institut Agronomique néo-Calédonien (IAC) pour la définition d’une stratégie de collecte de données optimale pour informer la gestion adaptative des populations de roussettes en Nouvelle-Calédonie. Sur la base d’une méthode élaborée par l’IAC, la province Nord, avec l’appui de l’ACCS et d’autres associations, assure le fonctionnement d’un observatoire des populations de roussettes basé sur un protocole de comptages d’émergences annuels sur une trentaine nids de roussettes en province Nord. Les derniers travaux de modélisation de la dynamique des populations de roussettes montrent une situation inquiétante. Dans ce contexte, et parallèlement au programme de concertation sur la gestion des roussettes en province Nord (Horizon roussettes), la province Nord souhaitait évaluer s’il existe des possibilités réalistes de renforcement du système de suivi et déterminer une stratégie de collecte de données optimale, notamment par l’augmentation éventuelle du nombre de nids suivi et/ou l’acquisition de données nouvelles complémentaires.

Egalement, une importante étude socio-anthropologique sur les représentations, valeurs et pratiques associées à la roussette en province Nord a été conduite par l'Institut Agronomique néo-Calédonien entre 2021 et 2022. Cela a permis d'étudier ces liens entre les habitants et habitantes de la province Nord sur 3 sites d’étude approfondis que sont Poya, Ouégoa et Hienghène mais également de réaliser des ethnographies des fêtes de l’igname en 2022. Une enquête relative à la place de la roussette dans la fête de la nouvelle igname et à la gestion coutumière actuelle de ces espèces en province Nord est également réalisées par l’Agence de Développement de la Culture Kanak-Centre Culturel Tjibaou.

Les résultats de ces études ne sont pas encore disponibles.

Une thèse soutenue par la province Nord sur la sensibilité des populations de roussettes aux prélèvements liés à la chasse (légale et illégale) et à la prédation par les chats harets* en Nouvelle-Calédonie. Ce travail a été réalisé par l'Institut Agronomique néo-Calédonien (IAC) en collaboration avec l'Institut Méditerranéen de Biodiversité et d'Ecologie marine et continentale (IMBE) et l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) avec le soutien des provinces Nord et Sud ainsi que de la Fondation François Sommer.

Cette thèse portait sur l'état des populations de deux espèces de roussettes sympatriques, la roussette rousse Pteropus ornatus (endémique) et la roussette noire P. tonganus (native) et l'impact de la chasse et de la prédation par le chat haret Felis catus, en Nouvelle-Calédonie. La zone d'étude comprenait la province Nord et la province Sud. L'étude de l'occupation des gîtes de roussettes en province Nord met en évidence une disparition de 33% en 40 ans. La population de roussettes sur la Grande Terre est estimée à environ 735 000 individus (des deux espèces confondues) et le taux de prélèvement de chasse annuel à 7%. La modélisation de l'évolution de la population de roussettes suggère que les prélèvements actuels pourraient conduire à un déclin de près de 80% dans les 30 prochaines années.

Les mises en place de moratoires temporaires et/ou de zones protégées apparaissent, en plus d'être combinables, comme les options de gestion les plus acceptables pour les chasseurs mais aussi les plus efficaces. Une analyse des données disponibles au niveau mondial montre que toutes les formes de chats s'attaquent aux chauves-souris dans l'ensemble des habitats et que cette menace est sans doute largement sous-estimée. Enfin, des premiers résultats suggèrent un taux de prédation des roussettes par les chats harets en Nouvelle-Calédonie de même ordre de grandeur que celui de la chasse. Cette étude propose un cadre d'évaluation de la soutenabilité à la chasse d'espèces gibier dans une démarche de gestion adaptative intégrée en prenant en compte d'autres facteurs de menace tels que les espèces invasives.

Télécharger la Thèse Malik

*Chats harets: chats domestiques retournés à l'état sauvage et descendants. Ils mènent une vie indépendante de celle de l'homme, ils se nourrissent notamment directement dans le milieu naturel. 

L'Institut Agronomique néo-Calédonien, avec le soutien technique et financier de la province Nord, a également réalisé une étude sur les déplacements des roussettes à connaître les aires de gestion à considérer pour les populations de roussettes.

Onze balises Argos ont été déployées sur des roussettes entre 2013 et 2014 et cinq dispositifs GPS e-obs ont également été placés sur des roussettes en 2015. La plus grande distance entre deux sites diurnes fréquentés par un individu est de 118 km. Pour les espèces Pteropus ornatus et Pteropus tonganus, un individu peut utiliser plusieurs sites de repos diurnes, plus ou moins éloignés les uns des autres. La plupart des aires de gagnage se trouvent à moins 15 km du gîte, et sont le plus souvent à moins de 8 km. Le trajet le plus long relevé en une nuit est d’environ 38 km.

Dans le cadre du programme de suivi à long terme des tendances évolutives des effectifs de roussettes au sein des gîtes de la province Nord, des comptages de roussettes sont réalisés chaque année en septembre depuis 2010, selon un protocole déterminé et pour une sélection d'une trentaine de gîtes, afin de suivre les effectifs.

L’objectif de ce suivi est de mieux connaître les fluctuations naturelles, l’état et les tendances évolutives des populations de roussettes en province Nord. Ce projet réunit aujourd’hui la province Nord, l’Institut Agronomique néo-Calédonien (IAC), l’Association pour la Conservation des Chauves-Souris (ACCS), l’association Dayu Biik, les référents locaux (coutumiers, propriétaires et assistants terrain) et, plus récemment, l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie (IMBE) ainsi que des particuliers s’investissant chaque année dans les comptages aux côtés des associations et des gardes nature.

Des travaux sur le régime alimentaire des roussettes et leur rôle dans la pollinisation des fleurs et la dissémination des graines, ont également été menés dans le cadre de cette étude. Les premiers travaux ont cherché à identifier et tester des méthodes afin de constituer et de mettre à jour une liste d’espèces consommées par les roussettes. Cela a notamment permis d'identifier 47 espèces connues pour être consommés, pour leurs fleurs, leurs fruits et/ou leurs feuilles.

Depuis quelques années, de nombreux témoignages d'habitants et d'habitantes alertaient les provinces sur la diminution des effectifs de roussettes en Nouvelle-Calédonie. Gibier très apprécié, patrimoine naturel et culturel, les roussettes et leur chasse avaient néanmoins été peu étudiées jusque-là, et il était difficile de juger de l’ampleur du déclin constaté et d’évaluer les meilleures mesures de gestion à adopter.

Sur demande de la province Nord, la première étude de cette ampleur à été réalisée par l'Institut Agronomique néo-Calédonien dans le but d'améliorer nos connaissances de la biologie et l'écologie des populations de roussettes et de l’état de la ressource. Les enquêtes auprès de la population locale et relevés sur le terrain sont les deux outils méthodologiques essentiels utilisés dans le cadre de cette étude, à savoir le recensement des gîtes diurnes de roussettes à dires d'acteurs sur près de 87% du territoire.

Après 27 mois de terrain, les enquêtes ont permis de faire l’inventaire de la plus grande partie des gîtes de Mégachiroptères présents en province Nord. Ce sont 536 gîtes de Mégachiroptères – localement appelés ‘nids’ ou ‘campements’ de roussettes – qui ont été recensés auprès de la population locale. D’après les personnes interrogées, 126 auraient disparu à ce jour et 410 existeraient potentiellement encore aujourd’hui dans les secteurs étudiés.

Les roussettes rousses (Pteropus ornatus) et de roussettes noires (Pteropus tonganus) sont les mieux connus des personnes ressources mais aussi probablement les plus abondantes, et ce sont donc ceux pour lesquels d'avantage d’informations ont été récoltées. Les populations et les gîtes de roussettes des cailloux (Pteropus vetulus), espèce beaucoup plus discrète, et de roussettes à queue (Notopteris neocaledonica), vraisemblablement rares, demeurent encore peu décrits.

Outre le recensement des sites de repos, les enquêtes ont permis tout au long de l’étude de mieux caractériser la diversité des pratiques relatives à la roussette et des représentations des acteurs, de confirmer l’importance de cette ressource dans la culture et le quotidien des communautés locales et d’accréditer l’hypothèse de diminution des effectifs. Le faible taux de renouvellement des populations confère aux roussettes du territoire une vulnérabilité certaine, et la surexploitation de la ressource par la chasse semble être la cause majeure de la tendance évolutive enregistrée.

Seule une adaptation des pratiques et activités humaines à la vulnérabilité des roussettes semble pouvoir enrayer ce déclin, et l’implication de la société calédonienne dans une démarche de gestion est alors indispensable à la pérennité de ce patrimoine. Dans cette perspective, cette étude doit être considérée comme le point de départ d’un travail à mener sur le long terme, des pistes de réflexion ont notamment été proposées pour orienter les actions à venir.

Temoignages

Malik Oedin : « Les roussettes sont en déclin et c'est à nous de réagir »

Malik Oedin entreprend de restituer quinze ans d'études scientifiques à travers un cycle de conférences. Après avoir mené une thèse sur l'état des populations des roussettes, il développe le programme « Horizon Roussettes » avec le concours de la province Nord.

À lire sur www.lnc.nc

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